Alexandre Blondel est professionnel du monde de l'art depuis plus de vingt ans. Il dirige une compagnie de danse-théâtre depuis plus de quinze ans et a été interprète comme danseur-acrobate auprès de nombreuses compagnies professionnelles. Son intérêt pour la question sociale, qui a toujours été le «ciment» du projet artistique de sa compagnie, l'a conduit à reprendre un cursus de sociologie à l'Université de Nantes, où il a réalisé deux enquêtes ethnographiques, sur les mécanismes de consécration d'un artiste chorégraphique et sur la médiation culturelle en direction d'un public non-initié, au cours de ses deux années de master. Aujourd'hui, il intègre le CENS afin de débuter une thèse intitulée : « les usages sociaux de la sociologie dans le domaine du spectacle vivant », sous la direction de Sébastien Fleuriel, professeur des universités en sociologie à Nantes Université, et de Pierre-Emmanuel Sorignet, maître d'enseignement et de recherche à l'Institut des sciences sociales de l'Université de Lausanne.
Le poids des représentations et du cloisonnement entre les deux mondes artistique et scientifique semble immuable. L'artiste n'oserait pas s'emparer du savoir scientifique ? La réciproque serait tout aussi vraisemblable. Les fantasmes et complexes seraient souvent à l'œuvre. Le·a chercheur·se sachant·e détiendrait l'autorité et l'artiste le monopole de la créativité.
Pourtant, ces dernières années, nous assistons dans le milieu du spectacle vivant à l'émergence de projets qui mettent en avant la collaboration entre artistes et chercheur·ses. Des incitations institutionnelles financières ont commencé aussi à apparaître sous forme d'appels à projet ou d'aides à la création. Ainsi, de nombreux·ses créateur·rices ont pu commencer à collaborer avec des personnes issues du monde universitaire. Il serait intéressant d'étudier ce mécanisme de décloisonnement des disciplines. La recherche d'une plus grande interdisciplinarité est-elle à l'origine de ce rapprochement entre art et science ? Cette collaboration consiste-t-elle en une mise à disposition de savoirs, de pratiques scientifiques en direction d'un·e artiste ? Peut-on parler d'une « réelle » collaboration entre les protagonistes ?
En outre, reprenant la question posée dans l'ouvrage dirigé par Bernard Lahire À quoi sert la sociologie ?, l'enjeu de cette thèse est d'étudier comment la sociologie peut inspirer des projets artistiques (stratégies de gains symboliques pour certain·es artistes...) et réciproquement ce que ces projets font à la sociologie en tant qu'ils contribuent à faire passer de la connaissance sociologique vers leurs publics (nouvelles formes de diffusion de la pensée...).